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Stockholm Syndrome
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21 février 2011

35-I) Verdict : coupable

Lundi 21 février 2011, 21:13 - Ça va devenir difficile de t'écrire, si je commence à croire que tu ne m'as fait aucun mal. Pendant si longtemps,  j'ai vécu avec la ferme conviction que tu m'en avais fait. Cependant tu existes. Tu as existé. Tu es Fatima. Du moins tu l'es pour moi.

Peut-être n'ai-je découvert ton existence que le jour de ton expulsion. Je m'en souviens comme si c'était hier : toi, debout devant toute l'école rassemblée dans la cour, que l'on jugeait, que l'on condamnait, que l'on chassait. Ça ne rigolait pas en ce temps-là. J'en ai pleuré. Mais est-ce que j'ai vraiment pleuré ? Ou bien est-ce encore un faux souvenir, un fantasme, une affabulation, comme pourrait l'être... tout le reste ?

Pourquoi aurais-je pleuré. - De honte ? De peur ? A l'idée que tu ne me dénonces comme on avait dû te dénoncer, que tu ne parles de ce que nous faisions dans les cabinets, tous les matins à l'heure de la récréation ? Pourquoi aurais-je pleuré ? - De soulagement, en comprenant que tu ne pourrais plus jamais me faire de mal ? Ou bien j'avais pitié de toi qu'on chassait comme un chien ? Faut dire qu'il y avait de quoi secouer n'importe qui, c'était tellement théâtral. Oui, spectaculaire et dramatique, ça l'est resté dans mes souvenirs. C'est pour ça que j'aurais pleuré dis-moi ? - s'il est vrai que j'aie pleuré ce jour-là.

Stockholm Syndrome. C'est bien compliqué tout ça.

Si vraiment tu ne m'as fait aucun mal, pourquoi est-ce sur toi que j'ai cristallisé tous mes faux souvenirs de sévices et d'abus sexuels ? Mais avoue que tu étais une cible toute désignée. On te chassait de l'école pour avoir commis une faute grave. Coupable tu étais, aux yeux de la directrice, des bonnes soeurs, des institutrices, des élèves et de leurs parents. Je t'ai chargée d'une faute de plus, et pas la moindre. En mon for intérieur, dans le secret de mon coeur, je t'ai accusée d'un crime bien plus terrible que ce qu'on te reprochait. Moi, je t'accusais de viol.

... C'est difficile de t'écrire, ne sachant plus ce que tu as fait ou ce que tu n'as pas fait. Mais tu existes. Tu as existé. Devant toute l'école rassemblée dans la cour tu t'es fait chasser. Et moi juré craché : je pleurais.

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